Plus d'égalité entre les étudiants : Graal ou chimère ?
A compter de la rentrée 2017, les conditions d'accès aux écoles d'avocats seront modifiées, en application du Décret n°2016-1389 du 17 octobre 2016. Moteur de cette réforme, l'égalité entre les étudiants est-elle possible ?
Les quelques 14.000 étudiants préparant actuellement l'examen d'entrée à une école d'avocat (EDA) au sein d'un Institut d’Études Judiciaires (IEJ, centre de préparation rattaché à une Faculté de Droit) vont plancher pour la dernière fois selon les modalités récemment remises en cause par les pouvoirs publics.
Cet examen (à l'issue duquel, contrairement à un concours, il faut obtenir un moyenne arithmétique de 10 / 20 pour se voir délivrer le précieux sésame permettant de s'inscrire dans une EDA), est jusqu'alors organisé au sein de chaque IEJ.
Sur la base d'études statistiques qui ont mis en lumières d'importantes différences (dans une mesure pouvant aller de 1 à 5) dans les taux de réussite des étudiants, le gouvernement a souhaité modifier les modalités d'organisation des épreuves afin de garantir l'égalité entre les candidats.
Si le but de cette réforme paraît louable, d'aucuns ne manqueront pas de souligner que sa portée pourrait être bien plus limitée. D'une part, force est de constater que les moyens dont disposent les IEJ sont relativement disparates. D'autre part, quand bien même les sujets seront établis par une Commission Nationale composées d'avocats et d'universitaires nommés pour 3 ans, les corrections resteront effectuées localement et confiées au IEJ (quand bien même une grille de correction sera annexée au sujet). Enfin, un étudiant reste libre de s'inscrire auprès de l'IEJ de son choix.
Rien ne permet d'ailleurs d'affirmer que le pourcentage de reçus par IEJ sera nivelé par le biais de cette réforme.
Au-delà des critiques fondées sur les taux de réussite, la réforme de l'examen d'entrée est surtout le moyen de sélectionner les futurs élèves-avocats sur des types d'épreuves identiques, ce qui n'était pas nécessairement le cas. Au-delà de la différences entre le sujets, la nature des épreuves pouvaient également varier.
En effet, certains IEJ choisissaient notamment de faire composer leurs candidats sur des épreuves de commentaire d'arrêt, d'autres sur des consultations.
Sur ce point, la réforme est particulièrement bienvenue d'autant que l'épreuve de consultation juridique est généralisée dès les épreuves d'admissibilité sur la base d'une thématique au choix du candidat (droit civil, droit pénal, droit social, droit des affaires ou droit public).
De même, les candidats composeront également sur une épreuve de note de synthèse et sur une épreuve de procédure (civile, pénale ou de contentieux administratif).
Si au stade de l'admission, l'épreuve dite du « Grand Oral » est bien évidemment maintenue, on reste sceptique quant à la nécessité de maintenir une épreuve de langue. En effet, dans la plupart des procédures contentieuses, la Loi impose la traduction des actes établis en langue étrangère de sorte qu'un bon avocat n'a pas nécessairement à devenir un fin linguiste.
Au surplus, à compter de la rentrée 2020, cet oral portera nécessairement sur la langue anglaise alors que jusqu'ici le panel de choix était bien plus large. On peut légitimement se demander si la recherche de l'égalitarisme n'a pas entraîner le sacrifice des autres idiomes sur lesquels les candidats pouvaient choisir d'être entendus...
Les étudiants passeront donc des épreuves identiques pour intégrer l'une des 16 écoles d'avocats (12 en métropole, 4 dans les Départements d'Outre-Mer). Reste à savoir si la sélection au titre de l'examen d'entrée se traduira par une augmentation corrélative du niveau de compétence des élèves-avocats au sein des EDA.
Dans le prolongement des modifications relatives à l'examen d'entrée, l'examen du Certificat d'Aptitude à la Profession d'Avocat (CAPA) devrait subir à son tour un toilettage d'ampleur...